DRUMMONDVILLE
Tapis rouge pour le film Écorchés, qui brise le silence sur l’exploitation sexuelle au Québec, présenté à Drummondville @ Crédit photo : Éric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.
C’était le dernier tapis rouge et la dernière présentation du long métrage, jeudi dernier à Drummondville. Après avoir été présenté au grand public, le film a été projeté à Drummondville avec l’équipe complète du film.
Si le tapis rouge a réuni les acteurs dans une ambiance festive, c’est avec fierté qu’ils ont réussi à porter un message important sur un fléau et l’enfer que vivent encore en 2024 de nombreux enfants, jeunes filles et jeunes femmes : celui des réseaux de prostitution, de proxénétisme et des agresseurs qui continuent de proliférer de façon inquiétante à Drummondville, comme partout en province.
Écorchés met en scène une réalité bien plus proche de nous qu’on ne le pense. Durant la production et lors des projections, pas moins de six personnes ont témoigné avoir été victimes de proxénètes, de crimes et d’agressions sexuelles liées à la prostitution, à la traite, au trafic et à l’exploitation sexuelle d’enfants, d’adolescents et même d’adultes. Ces récits incluent des enlèvements et des séquestrations qui ont conduit à des agressions sexuelles et des abus perpétrés quotidiennement contre des enfants, des adolescents et des jeunes femmes, laissant des familles dévastées par la disparition de leurs proches et l’impunité des criminels.
Dans une réalisation où la perfection du message compense certaines limites techniques, le film est porté par un ensemble d’artistes talentueux, avec des performances remarquables, notamment de Mélanie Dumais, qui incarne un rôle important, Christine Blanchard, Régis Simard, Martin Paquette et Sylvain Laforest. Ce film se distingue par la volonté et la générosité des comédiens, qui, portés par un message dur et une réalité qui persiste, dénoncent un phénomène encore bien présent aujourd’hui. À l’heure où le numérique et le web facilitent le travail des proxénètes, qui agissent de plus en plus impunément en raison de l’anonymat que procure Internet, Écorchés lance un cri d’alarme.
Des exemples de tolérance désarmante montrent qu’il est urgent que la complaisance volontaire cesse. C’est le message également véhiculé par l’équipe de production, les comédiens, et même le public. Les proxénètes, les agresseurs, ceux et celles qui profitent de la vulnérabilité des jeunes femmes et des enfants, agissent en toute impunité. Si nos élus, maires, ministres, et même notre gouvernement ne prennent pas des mesures plus efficaces, le fléau de l’exploitation sexuelle continuera de s’aggraver.
Lors de la présentation, Nancy Morin, entourée de Mélanie Dumais et de l’ensemble des comédiens et membres de la production, a ouvert les échanges à la fin de la projection, laissant peu de spectateurs indifférents dans l’audience. Un message poignant a été délivré à la fin du film par Stéphanie, qui a vécu l’enfer du monde des proxénètes, ainsi que par Martine Rouer, qui, dans un témoignage tout aussi vibrant et poignant, a exposé les séquelles importantes laissées par ce fléau qui persiste encore aujourd’hui.
Chloroformées, séquestrées, droguées, agressées et violées, autant par des étrangers rencontrés pour une nuit que parfois même par des proches, les témoignages dévoilés après la projection du film ne laissent aucun doute sur la gravité de la situation et de ce fléau. À la fin de la projection, six femmes ont pris la parole pour parler de leurs propres agressions, donc Christine Blanchard et Stéphane Pontbriand. Ce n’est pas seulement le fait d’être physiquement séquestrées qui est dramatique, c’est de rester prisonnières dans nos corps et nos souvenirs, qui ont marqué nos vies, ont-elles ajouté lors de leurs témoignages.
Le film Écorchés, brise le silence sur l’exploitation sexuelle au Québec @ Crédit photo : Éric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.
Une réalité qui, comme l’a récemment rappelé l’enquête et le rapport de Statistique Canada, démontre d’ailleurs que Drummondville figure parmi les villes où la criminalité et les agressions sexuelles sont les plus élevées, avant même les grandes villes comme Montréal et Québec. Une réalité qui donne tout son poids au film présenté ici à Drummondville
L’acteur Sylvain Laforest, présent à Drummondville pour la projection du film, a pris la parole lors de l’événement. Il interprète le rôle d’un policier dans le film et rappelle l’importance de s’exprimer, de dénoncer, et surtout de donner une voix aux victimes de ce fléau en 2024. Selon lui, l’aveuglement volontaire renforce le pouvoir des proxénètes et des agresseurs. Il insiste sur la nécessité de prendre la parole, de demander aux élus et aux autorités d’exercer plus de pression sur ces réseaux et de soutenir les organismes qui viennent en aide aux femmes victimes, afin qu’elles puissent sortir du silence et de cet enfer qui brise des vies. M. Laforest a contribué à la production du film avec la conviction qu’il est crucial d’agir dès maintenant.
La générosité des comédiens et de l’équipe technique qui ont travaillé sans subvention ni cachet a rendu possible ce film, accompagné d’une bande sonore composée par Stéphane Martel et de visuels saisissants réalisés par Katia Cioce.
Lors de la présentation du film, le public présent était unanime : Écorchés rappelle que le proxénétisme et la prostitution sont encore des phénomènes très actuels et que l’aveuglement volontaire des municipalités, gouvernements et décideurs fait partie du problème.
Leurs actions doivent désormais faire partie des solutions, sont d’avis autant la réalisatrice que les comédiens qui ont participé au tournage.Bas du formulaire
La réalité demeure préoccupante tant que les autorités et les élus resteront silencieux, les proxénètes et agresseurs continueront d’agir impunément, et les victimes continueront de faire les manchettes des médias. Ce film rappelle que le drame ne réside pas tant dans les quelques cas qui frappent l’imaginaire, mais dans ceux, bien plus nombreux, qui passent sous silence. C’est là la meilleure raison de s’attaquer véritablement à cette problématique.
Tapis rouge pour le film Écorchés, qui brise le silence sur l’exploitation sexuelle au Québec, présenté à Drummondville @ Crédit photo : Éric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.