DRUMMONDVILLE
Le dossier des deux accusés, Benjamin Chavannes et Gérald Junior Charles, était de retour au palais de justice de Drummondville en lien avec des accusations de traite de personnes, de proxénétisme et de prostitution. Ces accusations découlent d’un réseau présumé établi à Drummondville, lequel, selon la preuve déposée à la suite d’une enquête, impliquerait une adolescente en fugue d’un centre jeunesse de Drummondville.
Le dossier des deux accusés, Benjamin Chavannes et Gérald Junior Charles, était de retour au palais de justice de Drummondville @ Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55 Tous droits réservés.
Un procès sous haute surveillance s’est tenu à Drummondville, en présence de nombreux constables spéciaux et sous des mesures de sécurité particulières. Un procès aux enjeux importants pour les deux coaccusés, qui font face à des chefs d’accusation graves et continuent de plaider leur innocence.
À l’origine de cette affaire, sept accusés liés à l’exploitation d’une adolescente opérant depuis Drummondville ont été traduits en justice. Certains ont déjà été reconnus coupables. Ces coaccusés font face à plus d’une douzaine de chefs d’accusation, incluant la traite de personnes, le proxénétisme et la prostitution. Parmi eux figurent des résidents de Drummondville, Sorel, Laval et Québec.
Le Vingt55 a assisté au procès de cinq jours, tenu en novembre dernier au palais de justice de Drummondville, marqué par des mesures de sécurité renforcées en raison du nombre important d’accusés et des risques potentiels de débordement.
L’affaire de traite de personnes, dans le cadre d’un important procès, a mis en lumière un réseau structuré opérant depuis Drummondville.
Les sept coaccusés Kimberly Champagne et Célestin Garrentz résidents de Notre-Dame-du-Bon-Conseil, dans la MRC de Drummond, Benjamin Chavannes de Laval, Jimson Pierre de Repentigny, Sébastien Thibault de Sorel-Tracy, Vicky Bélanger de Sainte-Thérèse et Gérald Junior Charles de Laval. Ils font face à des accusations de traite de personnes et de fraude.
Ils sont soupçonnés d’avoir exploité des adolescentes, notamment en les déplaçant dans divers hôtels de la région et d’autres provinces, jusqu’à leur arrestation dans un motel de Joliette, un endroit connu des autorités pour ses activités liées à la prostitution. La jeune adolescente, qui était signalée en fugue, a été identifiée positivement lors de l’intervention.
Grâce à une enquête des enquêteurs et des dossiers menés par le procureur de la Couronne Jean-Philippe Garneau. Les autorités ont pu identifier et inculper ce groupe, décrit par certains intervenants et autorités comme la « pointe de l’iceberg » d’un des réseaux de traite de personnes actifs dans la région à partir de Drummondville et du Centre-du-Québec.
Lors de son témoignage, une adolescente victime a relaté comment elle avait été secourue in extremis grâce à une intervention policière.
Les faits dans cette affaire se sont déroulés entre le 8 et le 16 mars 2022, période durant laquelle une jeune adolescente qui en sortie non-autorités du centre jeunesse de Drummondville aurait été piégée par ce réseau de traite de personnes, a craint pour sa liberté et sécurité alors que ce réseau opérait principalement depuis Drummondville, notamment à Notre-Dame-du-Bon-Conseil. La victime a témoigné avoir été coupée de ses contacts en étant privée de son téléphone et de ses papiers d’identité.
Traite de personne et prostitution, de Drummondville vers le Nouveau-Brunswick
C’est en effet ce qui a été mis en preuve lors du procès, ainsi, selon la vessions de le jeune adolescente c’est après avoir été privée de ses effets personnels, qu’elle a été conduite à une résidence à Notre-Dame-du-Bon-Conseil, où elle pensait initialement être en sécurité. Cependant, elle a rapidement été transférée au Nouveau-Brunswick et exploitée par un groupe de fraudeurs. Hébergée dans un logement Airbnb, elle recevait peu de nourriture mais était régulièrement approvisionnée en cannabis et alcool, a précisé le procureur de la Couronne. Ne parlant pas anglais, elle a souffert d’un isolement accru, la rendant particulièrement vulnérable. Plus tard, elle a été déplacée dans une chambre de motel où ses exploiteurs collectaient les revenus issus de son exploitation, la privant de tout moyen de communication.
Une première intervention policière infructueuse pour soustraire l’adolescente du groupe et du réseau
Une intervention policière aurait pu mettre fin à son calvaire. Un policier du Nouveau-Brunswick, l’ayant aperçue en compagnie de deux coaccusés quittant un motel associé à des activités de prostitution, a tenté de la questionner. Cependant, craignant des représailles, elle n’a pas osé révéler sa situation. Les coaccusés, interceptés pour une infraction routière, ont été relâchés faute d’informations suffisantes.
Plus tard, des photos de l’adolescente présentant des blessures ont été retrouvées sur un site de rencontres en ligne, révélant l’emprise exercée par ses agresseurs. « Il était question de me déplacer vers un autre secteur. À ce moment-là, je me suis dit que je ne reviendrais jamais, que j’étais perdue », a-t-elle déclaré lors de son témoignage.
L’adolescente a été localisée lors d’une intervention à Joliette, où elle avait été identifiée comme étant en fugue. Elle se trouvait alors en présence de certains coaccusés dans un motel, un lieu connu des policiers pour ses activités avec des activités de prostitution.
Arguments de la défense et réplique de la Couronne
La défense des coaccusés a tenté de présenter une version différente des faits, affirmant que certains accusés n’auraient joué que des rôles d’accompagnateurs et n’avoir aucun lien avec les inflations telles que portés .
« La version de la jeune femme correspond davantage à celle d’une adolescente en fugue », a soutenu l’un des avocats, tout en remettant en question le lien entre les blessures de la victime et les accusés. Le procureur Jean-Philippe Garneau a contesté ces affirmations en présentant une chronologie accablante des événements et des éléments de preuve solides qui soutiennent les chefs d’accusation. « Il faut examiner le dossier dans son ensemble », avait rappelé et soutenu Me Garneau.
Pour la majorité des accusés, les sentences tombent ; d’autres restent à venir
Le Vingt55 a assisté à l’audience de Sébastien Thibault, qui a pour sa part reçu sa sentence en mars dernier.
Lors des plaidoiries, son avocate, Me Vicky Powell, a plaidé la moindre implication de son client, soutenant que ce dernier ignorait l’âge de la victime et ne connaissait pas la nature exacte des activités de l’organisation. Selon la défense, Thibault aurait simplement accepté de transporter une personne, croyant qu’elle était impliquée dans un réseau de fraude, et non de prostitution.
« Un simple transport qui m’a coûté cher »
Sébastien Thibault a reconnu avoir transporté la jeune femme à la demande d’autres individus. « Je devais la reconduire à trois hommes », a-t-il déclaré, précisant qu’il avait accepté cette tâche en échange d’une somme de 50 $, qu’il affirme ne jamais avoir reçue.
Me Powell a soutenu que son client ne pouvait être tenu responsable des événements survenus par la suite et qu’il ignorait les sévices infligés à la victime. « Ce qu’a vécu la jeune femme est assurément épouvantable, mais mon client ne peut y être lié, puisqu’il n’a jamais été impliqué dans ce groupe de trois personnes, d’ailleurs en conflit avec lui au moment du transfert », a-t-elle plaidé.
Sébastien Thibault a été condamné à une peine de huit mois d’emprisonnement, dont 46 jours de détention préventive ont été soustraits, ramenant sa peine à six mois et 15 jours. Il devra également se soumettre à une probation de trois ans.
Garrentz Célestin a plaidé coupable et a été condamné à sept mois de prison avec probation. Vicky Bélanger a été arrêtée après l’émission d’un mandat et condamnée à cinq mois de détention
Parmi la liste des accusés, Kimberly Champagne a reconnu sa culpabilité à un chef d’accusation amendé de tentative de proxénétisme, en vertu de l’article 286.3(1) du Code criminel. Elle reviendra en cour le 21 mai pour une comparution pro forma, tout comme Jimson Pierre, qui a également plaidé coupable.
Dans les dossiers de Benjamin Chavannes et Gérald Junior Charles, l’honorable juge Paul Dunnigan, qui préside les procédures, avait initialement pris la cause en délibéré jusqu’au 5 mai. Il a toutefois informé les avocats et le procureur au dossier lundi, qu’il rendra son verdict début juin, comme il l’a confirmé en présence du procureur de la Couronne, Me Jean-Philippe Garneau. À cette étape, le juge a précisé aux parties qu’il se prononcera sur la culpabilité ou non des deux coaccusés, qui demeurent en liberté durant les procédures.

En avant-plan, le procureur de la Couronne, Me Louis-Philippe Garneau, suivi des avocats de la défense @ Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55 Tous droits réservés.
Infos juridiques
Présomption d’innocence
Le Vingt55 rappelle que toute personne accusée au criminel a droit et bénéficie de la présomption d’innocence jusqu’à la décision d’un juge au terme d’un processus judiciaire complet.
Le système pénal canadien repose sur un principe fondamental: toute personne accusée d’avoir commis une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que la preuve de sa culpabilité soit établie hors de tout doute raisonnable devant un tribunal.
Comme une personne accusée d’un crime s’expose à de lourdes conséquences, la présomption d’innocence revêt une importance capitale. Ce droit est reconnu à l’article 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés. La présomption d’innocence est un droit individuel qui exige que:
L’accusé n’a pas à prouver qu’il est innocent, sa culpabilité doit être établie par le poursuivant, par une preuve hors de tout doute raisonnable.
La charge de le prouver incombe à l’État, au Québec, il s’agit du Directeur des poursuites criminelles et pénales qui agit par l’entremise de ses procureurs aux poursuites criminelles et pénales.
Les poursuites criminelles doivent se dérouler conformément aux procédures légales et à l’équité.