Travailleurs de la signalisation routière : 22 décès, des rapports accablants « Trop de morts, trop de silence », dénoncent les travailleurs

Travailleurs de la signalisation routière : 22 décès, des rapports accablants « Trop de morts, trop de silence », dénoncent les travailleurs

DRUMMONDVILLE

Des dizaines de travailleurs de la signalisation routière tiennent aujourd’hui une activité symbolique funèbre devant le bureau de circonscription de la ministre des Transports à Québec. « Trop de morts, trop de silence », clament les participants à la marche funèbre à la mémoire des 22 personnes décédées depuis 2008 dans un accident de travail.

La présidente de la section locale 9005 des Métallos, Nathalie Perron, souligne l’urgence d’agir. « On ne se sent pas pris au sérieux. Les accidents graves qui frappent nos membres sont souvent évitables. Québec doit tout mettre en œuvre pour que ces tragédies prévisibles cessent. Nous avons multiplié les appels sans réponse. Nous sommes rendus à pleurer nos morts devant les bureaux de la ministre », déplore la présidente de la SL 9005, Nathalie Perron, qui représente plus d’un millier de travailleurs de la signalisation routière et qui travaille elle-même dans le domaine.

Depuis 2008, on dénombre 22 décès dans le secteur de la signalisation routière, dont trois seulement en 2024. Voilà maintenant près d’un an que les Métallos demandent, en vain, une rencontre avec la ministre et un meilleur encadrement du secteur de la signalisation routière pour rendre le métier sécuritaire.

Tragédies à Drummondville et au Centre-du-Québec

Le décès de deux travailleurs de la signalisation routière, soit le 6 août sur l’autoroute 20 dans un délit de fuite mortel pour un signaleur, et un deuxième accident mortel, soit celui de Pascal Cauchon, signaleur routier de 39 ans, happé par un camion lourd de type train routier le 8 avril 2021 alors qu’il travaillait sur une portion de l’autoroute 20, à Saint-Cyrille-de-Wendover, avaient soulevé l’indignation dans l’industrie.

La famille du travailleur de chantier, Pascal Cauchon, décédé sur l’autoroute 20 à Drummondville, rencontrée par le Vingt55, demande une enquête publique sur les circonstances de l’accident.

En entrevue au Vingt55, le beau-père de la victime, Michel Heinrich, continue de marteler qu’une enquête aurait dû être menée après le décès du travailleur. Selon lui, le camionneur impliqué dans l’accident disposait d’une caméra embarquée qui démontrerait, à son avis, la négligence du conducteur impliqué.

« Une vidéo, soumise au dossier et tirée de la cabine du conducteur, montrant les derniers instants de vie du travailleur, aurait pu démontrer la négligence ou conduire à des accusations envers le conducteur impliqué », avait fait valoir Michel Heinrich, le beau-père du travailleur. La famille réclame toujours que justice soit rendue et que les circonstances de l’accident ainsi que la vidéo soient rendues publiques.

« Nous avons reçu très peu de soutien et de réponses de la part du gouvernement du Québec. La manière dont la ministre Guilbault avait géré la situation a offert peu de collaboration et de réponses à la famille », s’est indigné Michel Heinrich.

La famille réclame toujours une enquête publique à la suite du décès de Pascal Cauchon. Selon elle, le rapport accablant du coroner Yvon Garneau mettait en évidence des lacunes importantes qui auraient dû rouvrir le dossier et mener à une nouvelle enquête, affirme M. Heinrich, beau-père de la victime rencontré par le Vingt55.

De nombreux décès et recommandations du coroner Yvon Garneau

Le coroner Yvon Garneau avait formulé des recommandations importantes à la suite du décès de Pascal Cauchon, mortellement happé sur l’autoroute 20 en avril 2021 à Drummondville.

Ces recommandations, expliquées en entrevue au Vingt55 et tirées de son rapport rendu public en avril 2022, prennent en compte les améliorations apportées par la CNESST, le MTQ et l’employeur, entre autres.

Comme l’a rapporté le Vingt55 lors de la publication du rapport, le coroner recommande à la SAAQ « d’intensifier ses efforts en menant des activités d’éducation et de sensibilisation auprès des conducteurs de véhicules quant à l’importance de respecter le corridor de sécurité mis en place lors de travaux sur le réseau routier. »

Le coroner recommandait également au MTQ « d’installer un panneau à messages variables (PMV) localisé le plus près du chantier, annonçant 24 h à l’avance toute entrave de voie et que celle-ci soit annoncée, en temps réel, sur les PMV; de se concerter avec la Sûreté du Québec pour une surveillance policière accrue lors de l’installation et de l’enlèvement des dispositifs de signalisation pendant les travaux; d’abaisser la vitesse à 70 km/h pour les travaux de courte durée lors de l’installation et de l’enlèvement des dispositifs de signalisation; et d’augmenter les amendes et les points d’inaptitude des conducteurs en cas de non-respect du corridor de sécurité mis en place lors de travaux sur le réseau routier. »

Aujourd’hui, le secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), Denis Bolduc, qui participe également au cortège, invite Québec à travailler avec le Syndicat pour améliorer la situation.

« Nous avons confiance que la situation peut s’améliorer si le gouvernement se met en mode écoute et qu’il renforce bel et bien le contrôle sur cette industrie. Le laisser-aller a coûté déjà trop de vies, un coup de barre est nécessaire. On demande du sérieux », plaide-t-il.

En septembre 2020, à la suite d’un troisième décès en peu de temps, dont celui du travailleur Pascal Cauchon, des travailleurs avaient tiré la sonnette d’alarme afin de protéger leur vie ainsi que celle de leurs confrères et consœurs de travail.

Les revendications des Métallos

Les Métallos demandent un meilleur encadrement de l’industrie de la signalisation routière, qui impliquerait entre autres :
• Une certification des agences de signalisation routière ;
• La vérification annuelle de la conformité des équipements de ces agences, des permis, des cartes de compétence et des inspections régulières des travaux de signalisation ;
• La mise en place d’un programme de formation complet menant à des cartes de compétence émises par le comité paritaire (en remplacement des formations offertes actuellement par différentes associations, souvent en ligne).

« N’attendons pas une autre tragédie pour agir. Le gouvernement doit prendre de toute urgence des mesures pour qu’on ne vive pas en 2025 une réédition de l’hécatombe vécue l’an dernier. Nous avons des idées pour mieux encadrer l’industrie et souhaitons en discuter avec la ministre », fait valoir le directeur québécois du Syndicat des Métallos, Dominic Lemieux.

Le Syndicat des Métallos, affilié à la FTQ, est le plus important syndicat du secteur privé au Québec. Il regroupe plus de 60 000 travailleurs et travailleuses de tous les secteurs économiques. La section locale 9005 des Métallos représente plus d’un millier de travailleurs de la signalisation routière au Québec.

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Éric Beaupré
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