De façon écrite, elles simulent d’adopter une réaction typiquement masculine devant un comportement typiquement féminin. Par exemple : « Quand il pleure depuis une heure en m’exprimant ce qu’il trouve difficile dans notre relation et que je lui réponds : pourquoi tu sors avec moi dans ce cas? » Ou encore : « Quand il m’écrit un long paragraphe par rapport à comment il se sent et que je lui réponds : je ne sais pas ce que tu veux que je réponde à ça.)

Cette tendance dénonce donc des comportements toxiques et de violence comme le gaslighting, la banalisation ou l’invalidation des émotions, la manipulation émotionnelle, etc. Elle a explosé sur TikTok dans les dernières semaines et il est très intéressant de lire dans les commentaires tous les témoignages de femmes qui, entre elles, se comprennent bien, ou encore qui réalisent qu’elles ne sont pas les seules à vivre cela. Ce qu’on peut en conclure, c’est que le problème est loin d’être individuel et qu’il est un de société, sans aucun doute.   

Qu’en pensent les hommes?

Des hommes ont cherché à renverser la vapeur en créant du contenu inverse et ont créé le hashtag #MenInFemaleFields (les hommes agissant dans les domaines féminins). Dans leur cas, on remarque bien souvent que les actions dénoncées se rapportent à des femmes qui ne sont tout simplement pas intéressées par eux. Par exemple : « Quand tout va bien lors de nos textos, mais qu’elle te ghost* après la première date. » ou bien « Quand une femme n’est pas intéressée par toi parce que tu es trop gentil. » On dénote aussi des comportements qui, à la fin, ne sont pas du tout des « domaines féminins », mais bien masculins… Ce qui émerge donc en premier lieu de cette tendance, du côté des hommes, c’est leur difficulté à être rejetés par les femmes. En d’autres termes : leur irritation devant un : « non ». On observe en second plan que les hommes eux-mêmes sont mécontents de comportements qu’ils adoptent en général.

Bien entendu, certaines vidéos dénoncent des actions féminines toxiques, car il en existe. C’est cependant la majorité des vidéos qui dévoilent cette frustration devant un rejet féminin, si bien que même les hommes réagissent au non-sens de la tendance renversée.

Les doubles standards.

Un double standard, c’est l’action sociale d’accepter un comportement pour un genre, mais de le refuser lorsqu’il est vécu par une personne de l’autre genre. Par exemple : une femme qui pleure est très bien reçue par la société. On dira d’elle qu’elle évacue ses émotions. Un homme qui pleure, quant à lui, aura plus de chance de se faire dire qu’il est faible et se fera plus souvent encourager à arrêter de pleurer.

On perçoit donc de façon distincte, dans cette tendance TikTok, que certains comportements sont bel et bien des doubles standards qui ne font aucun sens. En effet, lorsque certains comportements sont simulés par l’autre genre, il y a quelque chose qui cloche à l’intérieur de nous. Ce qui est le pire, selon moi, c’est que les comportements soulevés du côté des femmes parlent de violences sous plusieurs formes et d’actions toxiques, alors que du côté des hommes, on dévoile une difficulté à recevoir un « non ». En suis-je surprise? Pas du tout, en particulier si l’on regarde notre société avec la loupe de la culture du viol. En effet, les statistiques révèlent que 96% des agressions sexuelles seraient commises par des hommes et que 84% des victimes d’agression sexuelle seraient des femmes*.

Rappelons-nous qu’une agression à caractère sexuel est une prise de pouvoir sur l’autre, une violence sexuelle. Elles n’ont rien à voir avec des envies sexuelles incontrôlables, tout le monde est capable de s’occuper de soi-même sans avoir à passer ses désirs sur quelqu’un qui n’est pas consentant (et oui, je parle bien de masturbation!) Nous sommes des êtres développés avec une conscience morale, nous sommes tous en mesure de nous contrôler.

Cette tendance a, de façon involontaire, mis en lumière combien les violences envers les femmes sont fréquentes et banalisées. En cette fin des « 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes », je pense qu’elle s’est présentée pile au bon moment! La lutte contre les violences faites aux femmes est loin d’être terminée, mais chaque prise de conscience fait une différence.

On est là, on vous croit.

Paule Blanchette

Intervenante, CALACS La passerelle.

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*Ghost : arrêter de communiquer avec la personne (sur les plateformes virtuelles) malgré des messages pour entrer en contact.

*Date : rendez-vous galant.

*Guide d’informations à l’intention des victimes d’agression sexuelle, 3^ième édition.