En janvier 1926, une pièce de théâtre drummondvilloise… Raconte-moi l’histoire par André Pelchat

En janvier 1926, une pièce de théâtre drummondvilloise… Raconte-moi l’histoire par André Pelchat
Théâtre Rialto, situé du côté nord de la rue Cockburn, entre les rues Lindsay et Broek, Drummondville, vers 1915 © Crédit photo Société d'histoire de Drummond, Collection régionale; IC-2.4e7.

DRUMMONDVILLE

Un article signé Jean-Pierre Bélanger, publié par la Société d’Histoire de Drummond citeCamille Duguay comme le « véritable fondateur du journal La Parole ». Cependant, Camille Duguay ne fut pas « seulement » un journaliste. Chanteur baryton, directeur de journal, il fut aussi un auteur et, notamment, un auteur de théâtre.

Le 14 janvier 1926, 600 personnes assistaient,  à Drummondville, au lancement d’une pièce intitulée « La veillée de Noël à l’Hôtel-de-ville d’Arthabaska», pièce du terroir en deux actes. L’œuvre était signée Camille Duguay et crée par « Le cercle dramatique » de Drummondville, association établie en 1897. La représentation eut lieu au « Théâtre Archambault » (probablement le théâtre  « Rialto »*, fondé par M. Archambault, qui était situé du côté nord de la rue Cockburn, entre les rues Lindsay et Brock. Il fut fermé en 1939 et s’écroula en 1940). La direction avait été confiée à « Mademoiselle Doria Lemaire ». Celle-ci dont le nom complet est Marie-Doria-Cordélia Lemaire, dite « Marthe » (1886-1979), artiste et poète, rédactrice et journaliste, deviendra Madame Marthe Duguay deux ans plus tard, ayant épousé l’auteur de la pièce.

En ce qui concerne la pièce elle-même, il est douteux que, si on la rejouait aujourd’hui, elle obtienne plus qu’un succès de curiosité. Voici comment l’auteur la décrit :

« La Veillée de Noël », c’est le retour à la terre, l’amour de la famille, quelques travers nationaux joyeusement soulignés. A chacun d’en tirer une conclusion. En écrivant cette pièce, nous n’avons eu qu’un but: doter le théâtre canadien d’une œuvre du terroir, morale, éducationnelle, et faire revivre quelques traditions, en rendant un respectueux hommage au passé. »

Il est sûr que le public de 2022 grincerait des dents à certains passages de l’œuvre si elle était présentée aujourd’hui. Pour s’en convaincre, il suffit de lire ce passage du résumé où l’auteur décrit le principal personnage féminin, appelé « Marie » : « C’est une bonne épouse. Elle a été la compagne assidue de son mari, Jacques. Cependant, comme trop de femmes canadiennes, et d’autres nationalités aussi, elle a voulu évoluer dans le sens moderne, la mode. Il n’a fallu que l’apparition d’un étranger, Henry Greenwood, pour changer sa mentalité et la faire sortir de son véritable rôle. » Quant à son mari, Jacques, il est « le cultivateur modèle, fidèle à sa mission, heureux de son sort, l’homme pour qui la terre des ancêtres est un culte, une chose sacrée, pour laquelle il a un amour profond. C’est aussi le citoyen au gros bon sens, foncièrement droit et honnête, qui voit partout le bon côté des choses et ne veut que du bien à tous. » On voit que presqu’un siècle a passé depuis l’écriture de cette pièce, marquée par l’ancien nationalisme canadien-français. Rien n’y manque, ni la valorisation de l’agriculture comme vocation des Canadiens français, ni la femme frivole, ni bien sûr, un méchant, anglophone comme il se doit !

Elle fut néanmoins jugée suffisamment intéressante, en son temps, pour être reprise en dehors de la région de Drummond. Elle fut notamment montée à Québec avec des comédiens de la capitale, avec une mise en scène de  « M. Montcourtois Devalière, des Théâtres de la Porte St-Martin, Sarah-Bernhardt, Réjane, et régisseur général, metteur en scène des tournées mondiales de la Comédie Française.(…) Chant et musique sous la direction de Mme Moncourtois Devalière, premier prix du Conservatoire de Paris. ».

Selon « L’histoire du Centre-du-Québec » publiée en 2013, « Drummondville s’affirme, au début du XXe siècle,  par l’espace qu’elle donne au théâtre amateur ». Entre 1926 et 1977, 80% des 315 pièces présentées à Drummondville sont le fait de troupes d’amateurs.

Camille Duguay, pour sa part, quitta la direction de La Parole quelques mois après le lancement de sa pièce, ses relations avec son supérieur immédiat, M. Placide Rioux se dégradèrent sérieusement. Duguay quitta  « La Parole » et s’en fut fonder un nouveau journal, « Le Regard », qui ne survivra que deux mois. Le couple Lemaire-Duguay partit alors pour l’Abitibi où il dirigea brièvement un journal régional, avant de revenir au Centre-du-Québec et de s’installer à Victoriaville où il fonda en 1928 le journal « La voix des Bois-Francs », puis, « Le Nicolétain » en 1933. Il mourut à Victoriaville en mars 1936. Marthe Lemaire-Duguay reprit la direction du journal de Victoriaville et en assura la survie pendant environ 30 ans, devenant la première directrice de journal dans la région tout en poursuivant de nombreuses activités culturelles. Visiblement, elle avait du rôle des femmes une conception moins traditionaliste que celle représentée dans l’œuvre de son mari !  Elle décéda au pavillon George-Frédéric de Drummondville, en 1979.

*Merci à Gabriel Cormier, de la Société d’Histoire,  pour cette information.

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Éric Beaupré
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