Éoliennes au Centre-du-Québec : le courant ne passe pas partout

Éoliennes au Centre-du-Québec : le courant ne passe pas partout
La contestation citoyenne bat encore son plein dans la MRC de Nicolet- Yamaska : une autre pétition majoritaire remet en question l’acceptabilité sociale du projet.

Nicolet / Yamaska

La contestation citoyenne bat encore son plein dans la MRC de Nicolet-Yamaska : une autre pétition majoritaire remet en question l’acceptabilité sociale du projet.

Éoliennes @ Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55 Tous droits réservés.

Des citoyens choqués par l’attitude de leur municipalité

Une pétition de plus de 210 signatures contre le projet éolien a été déposée au bureau municipal de Grand-Saint-Esprit ce matin. Selon Jean-François Brunelle, un des signataires de la pétition, « l’acceptabilité n’est clairement pas au rendez-vous. Pourtant, le maire avait mentionné au départ qu’il n’irait pas de l’avant avec le projet éolien si 30 % des gens étaient contre. Plus tard, il a dit à plusieurs citoyens qu’à 40 % d’opposition, ce projet ne se réaliserait pas. Ensuite, il a avancé à des citoyens qu’il n’irait pas de l’avant si 200 personnes étaient en défaveur. Tous ces critères ont été rencontrés, mais le conseil a fait fi de l’opinion de ses citoyens et a choisi de poursuivre les démarches pour que le projet avance. »

En effet, malgré que la municipalité ait été au courant de cette opposition claire, lors de la dernière séance du conseil municipal, le 3 juillet dernier, une résolution a été prise à l’effet d’appuyer le projet d’éoliennes dans la municipalité, conditionnellement à l’acceptation des citoyens, par référendum. Or, celui-ci ne se ferait pas avant le mois d’octobre ou de novembre. Cette approche suscite de la frustration et même de la colère pour plusieurs citoyens de cette communauté qui ne se sentent pas écoutés. Janie Vachon-Robillard, porte-parole du comité Pour un choix éclairé dans Nicolet-Yamaska (PCÉNY) rappelle que « les municipalités ont jusqu’au 12 septembre pour dire s’ils vont de l’avant avec le projet d’éoliennes. Le conseil municipal de Grand-Saint-Esprit a pris la décision d’aller de l’avant avec le projet d’éoliennes avant cette date. C’est peut-être avec des conditions, mais ils y vont quand même. » Elle dénonce cette façon de faire les choses à l’envers et salue, au passage, l’intervention du maire de La Visitation qui aurait exposé à ses homologues le fait que la preuve de l’acceptabilité sociale devrait précéder la résolution d’appui dans le contexte d’un projet d’une telle envergure.

Pierre Blanchet, porte-parole des citoyens qui a remis la pétition, dit comprendre la méfiance des citoyens de Grand-St-Esprit dans ce cas d’appui, conditionnel à un futur référendum. « On sait que de telles multinationales sont capables d’investir des sommes considérables pour faire passer leur projet, malgré les clauses de certains contrats. Dans l’expérience de la MRC de l’Érable par exemple, la ministre avait affirmé qu’elle n’entrerait pas de force dans la gorge des citoyens un projet. Bien que la population fût clairement divisée et malgré la conclusion du BAPE recommandant la tenue d’un référendum, ils ne l’ont jamais eu et le gouvernement a bien octroyé le certificat autorisant les éoliennes, malgré tout. »

Cloé Blais, citoyenne de Grand-St-Esprit, tient d’ailleurs à rappeler que, selon le ministère des Affaires municipales et de l’habitation (MAMH), les conseils municipaux « doivent toujours prendre leurs décisions dans l’intérêt des citoyennes et citoyens qu’ils représentent »[1]. Dans notre démocratie, les élus travaillent d’abord et avant tout pour les intérêts des citoyens, pas des promoteurs.

Une panoplie de raisons justifiant de s’opposer

Pour Jean-François Guévin, résident de Grand-St-Esprit, « avoir des éoliennes visibles partout dans le village, et même de chez moi, ce serait une perte de qualité de vie importante ». Pour d’autres, cela troublerait leur « paix rurale », notamment par le passage d’un nombre considérable de camions lourds sur une longue période de temps et par le bruit significatif généré par les éoliennes une fois installées. Plusieurs disent avoir choisi de vivre en milieu rural pour avoir une tranquillité et ne veulent pas se faire imposer du bruit et des structures dérangeantes. « Pour ma part, dit Jean-Philippe Côté, c’est l’approche des promoteurs et de la MRC qui dérange le plus : depuis le début, il y a un manque de transparence et de respect de l’opinion des citoyens dans ce dossier. On vit dans une société de surconsommation et, au lieu de tenter de réduire notre consommation, on cherche des moyens pour consommer davantage ».

D’autres personnes dénoncent le fait que certaines centrales éoliennes provoquent des malaises et maladies chez les animaux et chez les humains. Cela est documenté par Santé Canada et notamment dans le livre « Le prix du vent ». Plusieurs élus sont au courant et pour les autres, la conférence tenue sur le sujet avec l’auteur de ce livre est disponible sur la page Facebook du comité Pour un choix éclairé.

Enfin, ce projet amène un enjeu financier majeur, car il nécessite des emprunts pharamineux. Les élus et le public n’ont toujours pas accès au montage financier du projet, tel que nous l’a réaffirmé récemment la MRC. Comment alors calculer les risques potentiels et les réelles retombées pour leur municipalité? M. Blanchet poursuit : « Considérant cela, comment les élus peuvent-ils se prononcer de façon libre et éclairée? Comment les citoyens peuvent-ils se positionner en faveur d’un tel projet sans information suffisante sur cet élément crucial pour leur communauté? Dans ce contexte, nous considérons que la MRC agit de façon irresponsable en voulant que nos élus et nos citoyens se prononcent sur cette question. »

Acceptabilité sociale?

Au-delà de toutes les nuisances possibles, les éoliennes représentent une réelle menace à la paix sociale des municipalités. On observe que cela crée de la division dans plusieurs municipalités qui sont concernées.

« On nous dit que ce projet ne se fera que s’il y a une acceptabilité sociale. En ce moment, on est en mesure d’affirmer qu’une partie importante de la population rurale n’accepte pas l’installation d’éoliennes sur les terres agricoles et à proximité de leurs résidences, comme c’est le cas à Grand-Saint-Esprit. La pétition que les citoyens ont déposée aujourd’hui en est la preuve. C’est une démarche qui demande beaucoup de temps et d’énergie et cela doit être reconnu », conclut Janie Vachon-Robillard, porte-parole PCÉNY.

[1] Rôle du conseil et des élus – Conseil municipal et élus – Ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (gouv.qc.ca)

À la suite de la volonté exprimée par Hydro-Québec de promouvoir le développement de l’énergie éolienne, la MRC de Drummond pour sa part entend faire preuve d’ouverture, tout en analysant soigneusement les enjeux.

Éric Beaupré
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