La fête des Mères: Pour ou contre ? …Oser en parler, la chronique du CALACS La Passerelle

La fête des Mères: Pour ou contre ? …Oser en parler, la chronique du CALACS La Passerelle
© Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.

DRUMMONDVILLE

S’il vous plaît, ne tirez pas sur la messagère, je pose simplement une question. Je dois vous avouer que ma réflexion a débuté par une question toute simple : d’où vient la fête des mères ?

Historiquement, si on se limite aux pays occidentaux, c’est en France, le 10 juin 1906, qu’eut lieu la première cérémonie en l’honneur des mères de familles nombreuses. À Lyon, en 1918, ce sont aux mères et aux épouses, ayant perdu fils ou maris durant la première guerre mondiale, qu’on rendait hommage. En 1929, le gouvernement français crée la journée des mères pour encourager les naissances. Il va jusqu’à voter la Loi du 24 mai 1950, qui rend officiel le devoir de la République de rendre hommage aux mères françaises par la Fête des mères.

De ce côté-ci de l’Atlantique, c’est Anna Jarvis, femme américaine sans enfants, qui organisa la première fête en 1908 en l’honneur de sa mère décédée 3 ans plus tôt. L’auteure Katharine Antolini explique que cet exercice « n’était pas pour célébrer toutes les mères. C’était pour célébrer :  « la meilleure mère que vous ayez connue, la vôtre !»  Pour faire suite à cela, le président américain Wilson en fait une fête officielle, célébrée dorénavant tous les deuxièmes dimanches de mai.

Et c’est ainsi que la tradition est remontée vers le Nord, ajoutant le caractère religieux d’une mère ayant conçu sans relations sexuelles (Marie) et devenant la patronne de toutes les mères humaines. Paradoxal… Depuis, la société québécoise (tout comme les autres sociétés occidentales) se plie en quatre pour mettre en valeur la générosité, l’oubli de soi, l’altruisme, … toutes qualités dévolues aux femmes – aux mères.

Le travail de maternité – Je trouve génial qu’on reconnaisse l’apport important des femmes en matière de soins aux générations futures : alimentation, hygiène, rendez-vous médicaux, soutien psychologique, soin de blessures, apprentissage des règles sociales, etc. Avec toutes ces tâches, je me demande pourquoi, jusqu’ici, a-t-on continuellement parlé de congé de maternité ?  Heureusement pour les mères, certains organismes féministes commencent à parler de travail de maternité :  toute la femme (corps, âme et hormones) est sollicitée par le travail de reproduction.

Je disais, donc, que toute la société désire reconnaître le travail des mères en mettant à la portée de la communauté humaine des moyens concrets pour démontrer cette reconnaissance. À part les cartes dessinées amoureusement par nos bambins, il importe d’y mettre le prix ! Sorties au restaurant, offres de bouquets achetés chez la fleuriste, achats d’objets à vocation domestique (peu recommandés cependant lors de cette journée !) … l’économie est ravie de s’en mettre plein les poches, année après année.

La reconnaissance – D’autres choses m’écorchent l’esprit. Cette « fête » sert-elle vraiment à reconnaitre l’apport immense des mères ? Si c’est un travail si important, comment se fait-il qu’un si grand nombre de femmes cheffes de famille monoparentales se retrouvent si souvent à demander l’aide sociale ou à devoir faire les banques alimentaires malgré qu’elles aient un emploi rémunéré ? Peu ou pas de revenus, pas d’impôts, pas de régimes de retraite privés, pauvreté assurée dans leurs vieux jours. Comment se fait-il qu’une femme qui retourne sur le marché du travail après plusieurs années consacrées à la « maternitude » est considérée comme n’ayant AUCUNE expérience de travail ?

La pression de faire des enfants – Sous un autre angle, la pression pour faire des enfants est palpable : « Quand nous feras-tu un petit-fils ou une petite-fille ? -Tu ne veux pas d’enfants ? Tu es une égoïste. – On ne devient pleinement femme que lorsqu’on devient mère. » Misère!   Ceci, sans compter les exigences envers la super maman : toujours en forme, jamais fatiguée, sportive, jamais impatiente envers ses enfants, cuisinant des repas toujours équilibrés, amante parfaite, hôtesse hors pair, …

Vous en voulez d’autres ?  Faites le calcul. Une minuscule journée durant l’année contre des heures, des jours et des nuits, des mois et des années à organiser, préparer, réserver, accompagner, inscrire, négocier, envoyer la carte de souhait à la belle-mère, gérer les urgences …  C’est ça, la charge mentale!

Mais il y a l’amour, me répondrez-vous. Et la générosité de l’amour. J’en conviens. Je suis moi-même mère et grand-mère.  Mettre un enfant au monde, quand on le veut, est une expérience extraordinaire, qui ne doit pas être forcée – le recul du droit à l’avortement aux États-Unis doit être surveillé de près.

Mais l’amour ne comble pas tout. Il peine à trouver des CPE et des garderies en milieu familial et à ajuster nos horaires pour s’y conformer ! Il trouve des écoles, pas toujours sécuritaires et manquant de personnel. L’amour peine souvent à joindre les deux bouts. L’amour est souvent bafoué par la violence, sexuelle, conjugale, psychologique, économique…

L’amour d’une mère a besoin d’un soutien réel de la société, d’un soutien ajusté aux besoins et à ses réalités, si souvent difficiles.  Pour moi, la reconnaissance du travail et de l’amour des mères ne peut pas se trouver en bas de ce niveau.

Alors, je crois que vous aurez deviné que la fête des mères, telle qu’on la connaît maintenant, pour moi, c’est non merci.

Vous avez des commentaires ou des questions sur ce sujet ou n’importe quel autre, écrivez-vous dans notre boite à questions : https://forms.gle/QDPmiPLswumYxv1M6

 

Jocelyne Desjardins

Intervenante – CALACS La Passerelle

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