Raconte-moi l’histoire… Le premier arbre de Noël au Canada, par André Pelchat

Raconte-moi l’histoire…  Le premier arbre de Noël au Canada, par André Pelchat
Un sapin Drummondvillois © Crédit photo Eric Beaupré Tous droits réservés.

Chronique historique d'André Pelchat

André Pelchat admet être un « raconteux » compulsif. Depuis son enfance, il a eu le désir d’apprendre et son premier réflexe en apprenant quelque chose est de le raconter pour l’apprendre à quelqu’un d’autre. C’est ce qui l’a amené à faire des études en histoire à l’université Laval, puis à exercer les métiers de journaliste, réalisateur et guide-accompagnateur de touristes. Entre autres. Auteur de deux ouvrages d’histoire et de nombreux articles dans la revue « Canada’s History » autrefois « The Beaver », il siège sur le comité de direction de la revue « Empreinte » magazine d’histoire de la Mauricie/Centre-du-Québec et, depuis les années 1990, présente des chroniques historiques à la Télévision communautaire des Bois-Francs, à Victoriaville.

 

 

Maison Riedesel, 90 Chemin des Patriotes, Sorel-Tracy Source : article « Maison des gouverneurs (Sorel-Tracy) Wikipedia Par Fralambert — Travail personnel, CC BY-SA 3.0,

L’arbre de Noël fait tellement partie du paysage, au Québec, comme ailleurs en Amérique du Nord, qu’on peut pardonner à la plupart des gens d’ignorer que… en Nouvelle-France, la coutume de décorer un sapin à Noël était inconnue. Les voisins des colonies anglaises ne la connaissaient pas davantage.  C’est une coutume d’origine allemande, qui visait à célébrer le solstice d’hiver. Dans l’Antiquité, les tribus germaniques décoraient à cette époque de l’année leurs maison de branches de sapin, arbre toujours vert et symbole de renaissance de la nature.  D’abord combattue par l’Église comme « païenne », la coutume fut éventuellement « christianisée » à l’époque médiévale.  On remplaça progressivement les branches par un arbre complet. On parle pour la première fois « d’arbre de Noël » en 1521. C’est au XVIIe siècle qu’on commence à illuminer les sapins avec des chandelles.

Mais comment la coutume arrive-t-elle au Canada ? Il n’y faudra rien de moins qu’une guerre, plus précisément la guerre d’indépendance américaine.

Le roi Georges III et le Parlement réalisent vite que les effectifs de l’armée britannique sont très insuffisants, éparpillés dans un immense empire, pour écraser la rébellion. De plus, les « rebelles » bénéficient d’une certaine sympathie dans la population anglaise. Le roi étant d’origine allemande est aussi prince de Hanovre (un des nombreux États composant l’Allemagne de l’époque). Il fait donc appel aux troupes de cette principauté puis signe une série de traités avec d’autres princes allemands qui lui fournissent des troupes.  Ce fut donc plus de 4 000 soldats allemands qui débarquent à Québec en 1776, sous le commandant du général baron Frederic Riedesel, originaire du duché de Brunswick. Son épouse, Frédérika, le rejoint l’année suivante, accompagnée de leurs trois filles, Augusta, Frederika et Caroline. Mais le baron est fait prisonnier, cette même année, lors d’une offensive qui tourne mal dans l’État New York.

Libéré en 1781, on le stationne à Sorel où il s’établit dans une maison construite pour lui et sa famille. C’est dans cette maison que, pour fêter leurs retrouvailles, Frédérika décide de donner une grande fête, à l’allemande, le jour de Noël. C’est là que les invités découvrent dans le salon, un sapin décoré de fruits et de chandelles. C’est le premier arbre de Noël au Canada, ce 25 décembre 1781. Une plaque commémorative trilingue (français, anglais et allemand) souligne l’évènement devant la maison en question, à Sorel.

À la fin de la guerre, les Riedesel retournent au Brunswick. Une quatrième petite fille y naîtra, qu’ils baptiseront « Canada ». La maison où ils résidèrent est encore debout, à Sorel.

Cela dit, la coutume de l’arbre de Noël ne fut pas adoptée au Canada à cette époque et l’arbre des Riedesel restera longtemps le seul à avoir été dressé au pays. C’est après le mariage de la reine Victoria avec un prince allemand, en 1840, que la coutume se répandra dans l’Empire britannique. Le prince consort, en effet, dressa un arbre de Noël « à l’allemande » au palais de Buckingham et la presse britannique en parla abondamment, créant une mode qui se répandit partout dans l’empire et au-delà, nos voisins du sud s’en étant rapidement emparés.

Une chronique d’André Pelchat pour le Vingt55.

Habitant à L’Avenir, près de Drummondville, André Pelchat se joint à l’équipe du Vingt55 pour écrire une chronique historique bi-hebdomadaire.  

 

 

Ref:  O! Tannenbaum, The Beaver vol 82:6, December/January 2003,p 34-35 Wilhelmy, Jean-Pierre, Les mercenaires allemands au Québec,Beloeil, Maison des Mots, 1984,330 p.

André Pelchat
CHRONIQUEUR
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