À Drummond aussi on lutte…Raconte-moi l’histoire par André Pelchat

À Drummond aussi on lutte…Raconte-moi l’histoire par André Pelchat
À Drummond aussi on lutte...Raconte-moi l'histoire par André Pelchat@ Montage photo Eric Beaupré / Vingt55 Tous droits réservés.

DRUMMONDVILLE

La plupart des gens ont vu le premier film de la franchise James Bond, soit James Bond contre le Dr. No. Plusieurs se souviendront d’un personnage, le colosse coréen « Oddjob », bras droit du méchant Dr. No. Beaucoup moins réalisent que l’acteur qui joue le rôle dans ce film de 1962, était de passage à Drummondville 9 ans plus tôt.  Pas en tant qu’acteur, cependant.

Un combat de Serge Dumont en 1976 

Le Californien George Kazuo Okamura, en novembre 1953, était beaucoup mieux connu sous le nom de « The Great Togo » et il était le premier « méchant japonais » dans le monde de la lutte en Amérique du Nord. Et c’est dans ce rôle qu’il apparaissait dans la page des sports de La Parole du jeudi 12 novembre 1953.  On nous annonçait qu’il allait affronter Lionel Baillargeon (« un rude gaillard possédant une force herculéenne » ) en finale d’une soirée comprenant quatre combats.

À cette date, les Drummondvillois étaient déjà familiers avec la lutte professionnelle, même si à l’époque, on croyait dur comme fer que les combats étaient réels. Dès 1941, le journal La Parole annonçait une grande soirée de lutte mettant en vedette le « champion du monde des lutteurs poids lourds », le célèbre Yvon Robert contre un certain John « Dropkick » Murphy, « ancien champion du monde des poids lourds junior ». La soirée mettait aussi en vedette Victor Delamarre, le célèbre homme fort du Lac Bouchette. Signalons qu’au Québec, la popularité d’Yvon Robert rivalisait avec celle de Maurice « The Rocket » Richard. D’ailleurs, j’ai su que, pour le premier rendez-vous d’amoureux, mon futur (à l’époque) beau-père avait amené sa promise à la lutte… ce qui fut moyennement apprécié par ma future belle-mère, d’après mon épouse.

La popularité de la lutte à Drummondville ne se démentit pas au long des années 1950. Après un creux dans les années 1960, les vedettes du ring seront de retour dès les années 70 avec la montée d’une nouvelle promotion, la Lutte Grand Prix. En 1972, la foule remplit le Centre civique (actuel Centre Marcel-Dionne) pour voir le fameux Géant Ferré affronter le vétéran Wladek « Killer » Kowalski. Mais surtout, la Lutte Grand Prix allait donner sa chance à un Drummondvillois, l’imposant Serge Dumont. Ce colosse, ancien videur de bar, fit ses débuts au Centre civique, plein à craquer, contre Sailor White.

Ici je peux inclure des souvenirs personnels : j’avais 14 ans à l’époque et je me souviens encore d’une série de combats opposant Dumont au méchant Tarzan « la Bottine » Tyler, géré par l’inimitable Eddy Creatchman. La carrière de Dumont avait commencé par une série de victoires ce qui était rare pour un débutant. À l’époque les lutteurs en début de carrière étaient généralement des « jobbers », c’est-à-dire qu’ils avaient pour rôle de se faire battre par les lutteurs plus expérimentés, tout en apprenant les ficelles du métier. Dumont, lui, fut vite mûr pour les finales des galas de la lutte Grand Prix et remporta plusieurs championnats. Après une carrière qui le fit voyager aux États-Unis et au Japon, Dumont se retira pour gérer sa compagnie de sécurité (« Sécurité Kolossal ») au début des années 1980.

Jusque-là, la lutte à Drummondville était surtout le fait des organisations « nationales », telles les Entreprises sportives de l’Est, la Lutte Grand Prix et la Lutte Internationale. Toutefois, dans les années 1980, la WWF de Vince McMahon a, comme partout ailleurs en Amérique du Nord, littéralement « siphonné » les principaux talents de ces organisations. Avec le départ des Rougeau, Bravo, Martel et autres vedettes québécoises vers les États-Unis, ce fut presque la mort de la lutte professionnelle au Québec. Cependant, le vide ainsi laissé, principalement dans les régions hors de Montréal et Québec où la méga-promotion de McMahon ne vient que rarement, ouvrait une fenêtre d’opportunités pour ce qu’on appelait jadis « la petite lutte », c’est-à-dire les promotions locales.

C’est dans ce contexte que quelques promoteurs, dont le plus important était Henri Dostie, commencèrent à organiser des matchs de lutte en utilisant des talents locaux, dont les frères Léo « Mad Dog » et Pierre « Cowboy » Lefebvre ainsi qu’ Éric Parenteau, les frères Labonté, Dino Beauchemin, Funky, ainsi que Richard « Dick » Tessier et Raymond Coutu, dont certains avaient lutté pour Lutte Internationale dans les années 1980. Finalement, en 1994, Jack, le troisième des frères Lefebvre, fondait la NBW (New Body Wrestling), qui existe toujours, bien que son fondateur soit décédé en 2022.

Et bien sûr on se souviendra de la « Merveille Masquée » et de son émission à la télé locale au début du siècle, rendu célèbre nationalement par Infoman !

Aux dernières nouvelles, la NBW prévoit sept spectacles dans la région en 2024. Qu’on le veuille ou non, la lutte professionnelle fait partie de la culture populaire québécoise, y compris dans Drummond et rien n’indique que c’est sur le point de changer.  Après tout, comme disait Victor Hugo « Ceux qui vivent sont ceux qui luttent ! »

André Pelchat
CHRONIQUEUR
PROFILE

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