Rechercher

Drummondville : des millions pour le divertissement, mais qu’en est-il de la sécurité ?

Drummondville : des millions pour le divertissement, mais qu’en est-il de la sécurité ?

DRUMMONDVILLE

Des entrepreneurs, propriétaires d’immeubles et même des pompiers de Drummondville expriment de vives inquiétudes quant à la gestion des secours et aux choix budgétaires de la Ville, qu’ils jugent préjudiciables à la sécurité des citoyens. Selon eux, les autorités municipales favorisent les infrastructures de loisir au détriment d’investissements cruciaux pour le service incendie.

Drummondville : la sécurité incendie sacrifiée au profit du divertissement ?

C’est en effet ce que semblent avancer certains propriétaires d’immeubles, hommes d’affaires et pompiers, qui s’interrogent sur la situation actuelle et sur tous les débats entourant autant les budgets que le financement des projets à Drummondville. « La sécurité des citoyens est tout aussi importante », affirme un propriétaire d’immeuble, qui devra investir des sommes importantes pour rendre ses bâtiments conformes.

Un service en situation de bris récurrent

« Comment peut-on accepter un bilan aussi alarmant du service de sécurité incendie ? », s’interroge un des pompiers qui a joint le Vingt55. Il affirme que la Ville de Drummondville se retrouve trop souvent en situation de bris de service, ce qui compromet l’efficacité des interventions. Pendant que des investissements considérables sont consacrés à la culture et au divertissement, notamment au Village Québécois d’Antan, au baseball et au hockey, la sécurité incendie ne bénéficierait pas du même traitement.

« Les pompiers, contrairement aux joueurs de hockey, ne sont pas sous les projecteurs. Pourtant, ils jouent chaque jour en infériorité numérique, avec un équipement désuet et des effectifs insuffisants. Imaginez une équipe de hockey sans gardien ni défenseurs. Nous faisons face à un déséquilibre similaire, avec des conséquences potentiellement tragiques », prévient un intervenant et pompier qui, comme de nombreux autres, considère que jouer sur le banc comme simple observateur d’une situation préoccupante est inacceptable. Il souhaite faire connaître d’autres enjeux liés à cette situation.

Un choix budgétaire contesté

Selon eux, la priorité budgétaire accordée au divertissement a des répercussions directes sur la sécurité publique. La Ville aurait écarté la construction d’une nouvelle caserne au profit d’un stade de baseball destiné à accueillir 800 spectateurs. Or, une nouvelle caserne aurait permis de réduire les temps d’intervention, de mieux protéger le parc industriel et d’assurer la sécurité des travailleurs et des entrepreneurs.

« On pense rarement aux pompiers jusqu’à ce qu’une tragédie survienne. Pourtant, attendre une catastrophe pour réagir est un risque que nous ne pouvons pas nous permettre », avertit-il.

Lui et plusieurs de ses collègues constatent que la construction d’un nouvel aréna semble aujourd’hui une priorité, alors que l’actuel est encore fonctionnel. « Mettre aux normes le service incendie ou améliorer le confort des spectateurs ? Rien que de poser la question laisse perplexe », lance-t-il.

La mairesse s’est récemment exprimée et a incité la communauté d’affaires à investir dans un projet de reconstruction estimé à 50 millions de dollars. La mairesse et la Ville, ayant reçu peu d’appuis pour ce projet, assurent toutefois que celui-ci est bien sur les rails et que de récentes discussions font progresser le dossier de rénovation. Comme le rappelle Le Vingt55, le projet avait été refusé en raison de lacunes évaluées par le gouvernement du Québec, qui estimait ne pas pouvoir accorder les montants demandés pour le projet tel que présenté à Drummondville.

Du côté du milieu des affaires, le chiffre avancé par la Ville semble difficile à expliquer. Un montant estimé entre 60 et 80 millions de dollars, selon le projet, pourrait être tout à fait réalisable à l’heure actuelle. Interrogée par Le Vingt55 sur l’estimation des coûts de 100 millions avancée par la mairesse, celle-ci, tout comme la Ville, est restée sans réponse, rappelant cependant que les projets sont toujours en cours et à l’étude.

Nous comprenons que le financement viendra de subventions ou du privé, mais les taxes et un tel projet seront assurément impactés par la part du financement. « Que devrait en conclure la Ville de Drummondville ? », s’interroge l’un des hommes d’affaires de la région.

La sécurité de la population n’est pas sacrifiée, loin de là, assure la Ville de Drummondville en réponse aux affirmations des employés syndiqués du service incendie. La Ville tient à rappeler que dans le budget 2025, elle accorde 23,9 M$ (ou 13,5 %) du budget à la sécurité publique, dont 8,2 M$ à la sécurité incendie. En parallèle, les loisirs et la vie communautaire représentent 20 M$, soit 11,3 % du budget, dont 5,7 M$ pour le transport en commun et adapté. De leur côté, les arts et la culture obtiennent un financement de 7,2 M$, soit 4,1 % du budget, incluant 3,5 M$ pour la bibliothèque publique.

Une sécurité compromise

Le pompier souligne que depuis plus de 20 ans, les experts alertent sur le sous-financement chronique du service incendie, estimant le retard d’investissement à plusieurs millions de dollars. Il questionne également la volonté politique de la Ville d’écouter ces experts et de mener des études indépendantes pour valider leurs recommandations.

Le taux de décès par incendie à Drummondville est 3,3 fois supérieur à la moyenne québécoise. Un chiffre alarmant, selon lui, qui rappelle le drame ayant coûté la vie à trois enfants et à leur mère. « Il faut agir avant qu’une autre tragédie ne se produise. Nos interventions souffrent encore d’improvisation », prévient-il.

De son côté, la Ville de Drummondville affirme que le taux de décès par incendie est une préoccupation majeure. Chaque blessure ou décès survenant dans le cadre d’un incendie est très préoccupant. Cela dit, dans la majorité des cas, l’efficacité des pompiers n’est pas en cause (ex. absence d’avertisseurs de fumée, négligence humaine, suicide). Une chose est certaine : le SSISCD est un leader au Québec en matière de prévention des incendies, rappelle la Ville de Drummondville, soulignant que ses initiatives ont remporté de nombreuses récompenses de la part de l’Association des techniciens en prévention incendie du Québec au cours des dernières années.

Le projet de construction d’une nouvelle caserne incendie n’est pas écarté, affirme la Ville de Drummondville. L’ajout ou non de casernes sur le territoire fait partie de l’analyse en cours dans le cadre de l’élaboration du Plan de développement du SSISCD. Ce plan sera mis en œuvre pour assurer la pérennité du SSISCD en fonction des besoins actuels et futurs.

Relativement au CMD, la Ville insiste sur le fait que le projet de modernisation n’a pas été refusé en raison de lacunes. Il n’a tout simplement pas été priorisé par le gouvernement du Québec, comme la majorité des projets déposés dans le cadre du PAFIRSPA. Selon les informations obtenues par Le Vingt55, le projet ne correspondait pas aux attentes d’un projet normé par le gouvernement du Québec.

Les travaux récents menés par la MRC de Drummond dans le cadre de la mise à jour de son Schéma de couverture de risques d’incendie ont permis de démontrer l’efficacité et l’efficience du Service de sécurité incendie et sécurité civile de Drummondville. Ses protocoles d’intervention sont conformes en tous points et ont été avalisés par le ministère de la Sécurité publique, garantissant ainsi à la population de Drummondville et aux municipalités desservies une qualité de service optimale. De plus, de multiples ententes d’entraide sont en place avec les municipalités avoisinantes, une approche préconisée par les orientations gouvernementales en matière d’incendie afin d’éviter les dédoublements.

Un appel à la réévaluation des priorités

« Il est inacceptable que la sécurité des citoyens soit reléguée au second plan. Il faut allouer un budget d’urgence pour garantir une protection efficace », insiste le pompier. Il rappelle que les récentes annonces de rénovation de la caserne n’ont été faites qu’à la suite d’une intervention de la CNESST, qui a contraint la Ville à agir après avoir exposé les pompiers à des particules cancérigènes.

« Une communauté forte se construit d’abord sur la sécurité de ses citoyens. Nous devons faire preuve du même esprit d’équipe et de solidarité qu’au hockey et travailler ensemble pour offrir aux pompiers les ressources nécessaires pour sauver des vies. »

Avant de soutenir des projets comme un nouvel aréna ou un stade de baseball, il enjoint la Ville à garantir en priorité la sécurité des citoyens de Drummondville.

Enfin, la Ville souligne que les travaux à venir à la caserne 1 vont bien au-delà des recommandations de la CNESST, qui demandait l’installation d’un système de captation des gaz à la source. Non seulement ces travaux seront réalisés, mais la Ville a décidé d’aller encore plus loin en matière de santé et sécurité au travail (SST) pour assurer le bien-être de son personnel pompier.

Partagez et commentez sur les réseaux sociaux!
Éric Beaupré
PHOTOREPORTER
PROFILE

Suivez-nous sur les réseaux sociaux:

Les derniers articles

Faits divers

Suivez-nous sur les réseaux sociaux:

facebookyoutube-icon
Partagez et commentez sur les réseaux sociaux!