DRUMMONDVILLE
Le mémoire, signé par 22 élu(e)s et ex-élu(e)s, recommande de confirmer la protection, l’intégrité et la pérennité des terres agricoles du Québec reconnues par la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles.
« Nous recommandons que l’objet premier de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAAQ) soit réaffirmé, de manière à interdire toute implantation de parcs éoliens ou de toute autre infrastructure industrielle de développement énergétique en zone verte », souligne Rachel Fahlman, co-porte-parole de Vent d’élus.
Ce mémoire intervient à un moment critique, dans un contexte de développement énergétique chaotique, sans égard à la protection du territoire agricole et des populations qui y travaillent et y vivent.
Mme Rachel Fahlman rappelle que Vent d’élus est un mouvement rassemblant des élu(e)s et ex-élu(e)s de tout le Québec, unis par le désir commun de veiller à la protection des terres agricoles, à la qualité de vie des citoyens, ainsi que par la volonté d’apporter des solutions au manque de démocratie dans le milieu municipal.
L’une des principales préoccupations des membres de Vent d’élus concerne l’invasion massive des terres agricoles par l’implantation de nombreux parcs d’éoliennes industrielles et de toutes les infrastructures connexes, telles que sous-stations électriques, réseaux souterrains de câbles, et multiples modifications du milieu agricole, incluant l’élargissement et l’ajout de chemins d’accès, la construction de pylônes, la mise en place d’aménagements aux abords immédiats des tours, et la bétonisation de leur base. S’ajoutent à cela les impacts négatifs visuels, sonores, psycho-sociaux, financiers, ainsi que sur la santé des citoyens et agriculteurs vivant à proximité de ces installations. Tout cela modifiera à jamais le milieu de vie des résidents et l’environnement rural québécois.
Ainsi, dans un contexte de développement énergétique chaotique, sans égard à la protection du territoire agricole et de ceux qui y travaillent et y vivent, Vent d’élus a soumis ce mémoire dont l’unique recommandation est de confirmer la protection, l’intégrité et la pérennité des terres agricoles du Québec reconnues par la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAAQ).
Mémoire déposé par Vent d’élus dans le cadre de la
Consultation nationale sur le territoire et les activités agricoles – Agir pour nourrir le Québec de demain
Février 2024
Qui sommes-nous?
Vent d’élus est un mouvement qui rassemble des élu.es et ex- élu.es de partout au Québec unis par un désir commun de veiller à la protection des terres agricoles et à la qualité de vie des citoyens ainsi que par la volonté d’apporter des solutions au manque de démocratie dans le milieu municipal.
Liste des signataires du mémoire :
Rachel Fahlman | conseillère municipale | Saint-Zéphirin-de-Courval |
Denise Gendron | mairesse | Sainte-Monique |
Gaétan Ruest | ex-maire | Amqui |
Sylvain Laplante | ex-maire | La Visitation-de-Yamaska |
Jean-Pierre Ducruc | ex-conseiller municipal | Sainte-Croix |
Claude Charron | ex-conseiller municipal | Vianney |
Christiane Bonneau | conseillère municipale | Saint-Camille |
Pascale Boislard | conseillère municipale | Saint-Albert |
Céline Dumas | conseillère municipale | Warwick |
Myriam Normandin | conseillère municipale | Saint-Elphège |
Michel Veilleux | conseiller municipal | Sainte-Monique |
Pierrette Lauzière | ex-conseillère municipale | Warwick |
Pierre-Paul Leblanc | ex-conseiller municipal | Sainte-Élizabeth-de-Warwick |
Roman Pokorski | conseiller municipal | Saint-Adèlphe |
Isabelle Clément | conseillère municipale | Hérouxville |
Stéphane Vincelette | conseiller municipal | Saint-Elphège |
Marthe Tértreault | conseillère municipale | Sainte-Monique |
Dany Drolet | conseillère municipale | Saint-Zéphirin-de-Courval |
François Rousseau | conseiller municipal | Saint-Léonard-d’Aston |
Normand Amesse | conseiller municipal | Salaberry-de-Valleyfield |
Sylvain Pillenière | conseiller municipal | Lotbinière |
Martine Bechtold | conseillère municipal | Saint-Wenceslas |
Contexte
Une des grandes préoccupations des membres de Vent d’élus concerne l’invasion massive des terres agricoles par l’implantation de nombreux parcs d’éoliennes industrielles d’envergure et de toutes les infrastructures connexes : sous-stations électriques, réseaux souterrains de câbles et artificialisations multiples du milieu agricole, à savoir l’élargissement et l’ajout de chemins d’accès, la construction de pylônes, la mise en place d’aménagements aux abords immédiats des tours et la bétonisation de leur base. Se rajoutent les impacts négatifs visuels, sonores, psycho- sociaux, financiers ainsi que ceux sur la santé des citoyens et agriculteurs vivant à proximité de ces installations. Tout cela modifiera à jamais le milieu de vie des résidents et l’environnement rural québécois.
C’est donc dans un contexte de développement énergétique chaotique sans égard à la protection du territoire agricole et de ceux qui y travaillent et y vivent que nous soumettons ce mémoire dont l’unique recommandation est de confirmer la protection, l’intégrité et la pérennité des terres agricoles du Québec reconnues par la Loi sur la protection du territoire et des activités agricole (LPTAAQ).
Ces trois prérogatives ont été récemment réaffirmées dans plusieurs décisions politiques et administratives prises au plus haut niveau du gouvernement québécois.
Permettez-nous de les rappeler ici :
la loi modifiant l’aménagement et l’urbanisme sanctionnée en juin 2023 article 2.2.1, alinéa 8 : La planification territoriale des municipalités régionales de comté et des municipalités poursuit, sans s’y restreindre, les finalités suivantes: la protection, la mise en valeur et la pérennité du territoire et des activités agricoles.
la politique nationale d’architecture et d’aménagement du territoire (PNAAT):
s’assurer que l’État joue un rôle structurant dans le développement des territoires en assurant la protection et la mise en valeur du territoire agricole;
offrir une protection accrue aux terres agricoles de meilleure qualité et maintenir un environnement propice au développement des activités agricoles.
Les orientations gouvernementales en aménagement du territoire (OGAT) : Orientation 3 : Planifier l’aménagement et le développement du territoire agricole de manière à assurer sa protection, la mise en valeur de son plein potentiel et à créer un cadre propice à la pratique des activités agricoles.
Le cadre de référence relatif à l’aménagement des parcs éoliens en milieux agricoles et forestiers, paragraphe 2.3:
protéger les terres cultivables de bon potentiel;
protéger les terres à drainage souterrain ou celles qui seront dotées de ce type de drainage à court ou à moyen terme;
favoriser la localisation des éoliennes et des lignes à la limite ou à l’extérieur de la zone agricole;
favoriser la localisation des ouvrages sur les terres dont le potentiel agricole et forestier est le plus faible;
éloigner les ouvrages des bâtiments agricoles et des autres installations agricoles.
Introduction
Rappelons qu’au Québec, le territoire cultivable ne représente que 2% du territoire, comparativement à 58% en France et 45% aux États-Unis.1 Rappelons aussi que le territoire légalement réservé à l’agriculture en zone agricole varie grandement d’une région à l’autre. Le Centre-du-Québec (93 %), la Montérégie (86 %), l’Estrie (69 %) et Chaudière-Appalaches (67 %) ont les plus grandes zones agricoles. Inutile de rappeler que cette importance va de pair avec la qualité des sols couplée au climat favorable : ces zones sont au cœur du Québec agricole et c’est ce cœur qui sera envahi de parcs éoliens en totale contradiction avec de nombreuses décisions gouvernementales!
Nous avons publié une lettre ouverte le 11 septembre 2023 qui résume bien nos préoccupations pour cet enjeu national. En voici un extrait :
«On ne peut plus rester là à ne rien faire.» Ce sont les mots prononcés par Daniel Habel, président de la Fédération de l’UPA Centre-du- Québec, lors d’une conférence de presse le 23 août dernier. Il faisait part de l’appréhension de son organisation face à la réduction anticipée de la production agricole en raison, entre autres, de l’arrivée planifiée de centaines d’éoliennes dans des secteurs parmi les plus productifs de la zone verte.
Lors de cette même conférence de presse, l’UPA dénonçait également
«l’opportunisme des décideurs politiques de tous les paliers» à renoncer à la protection des terres agricoles dans leurs milieux.
En tant qu’élus et ex-élus, nous, le Vent d’élus, ne pouvons pas non plus rester là à ne rien faire; nous ne pouvons pas être complices de cette perte imminente de nos terres fertiles. Avons-nous, en tant que société, oublié l’importance de se nourrir? De la sécurité alimentaire? Dans trente ans, quand les éoliennes arrêteront de tourner, que deviendra le garde-manger des québécois? Un dépotoir de socles d’éoliennes, cachés sous une mince couche de terre arable? Où en sera cette richesse rendue là?
Nous, le Vent d’élus, voyons la ressource immense et pérenne que renferment les terres agricoles du Québec que nous ont léguées nos ancêtres. Nous avons une vision sociétale à très long terme qui nécessite la sauvegarde et la protection, becs et ongles, de ces terres, et ce, pour des centaines d’années à venir. Il est hors de question d’amputer une partie de cette richesse collective au nom du soi-disant
1 https://www.upa.qc.ca/citoyen/apprendre/lagriculture-au-quebec
progrès quand il y a clairement d’autres options plus respectueuses de ce patrimoine nourricier qui s’offrent à nous.
Il est encore temps de prendre le temps, d’éviter vitesse et précipitation, de ne pas se laisser aveugler par des promesses de redevances qui pourraient garnir les coffres des municipalités à court terme mais qui auront un effet d’appauvrissement collectif à long terme. Ayons la clairvoyance et le courage d’envisager toutes les options qui s’offrent à nous et cessons de piger dans le maigre pourcentage de riches terres agricoles qui nous restent.
Constats
Nous constatons que dans le cadre du développement éolien, la Commission de la protection du territoire agricole (CPTAQ) a autorisé à ce jour 99% des demandes de dérogations pour l’installation d’éoliennes en milieu agricole2. Ce chiffre est très inquiétant vu la multiplication de ces projets en milieu agricole et l’objectif d’Hydro- Québec de tripler le nombre d’éoliennes sur le territoire à l’horizon 20353. Face à cette menace pour le territoire agricole et tenant compte de la faible superficie cultivable, il est essentiel de réaffirmer l’objet premier de la LPTAAQ en zone agricole et l’indépendance politique de la CPTAQ dans son rôle de protection des terres zonées agricoles (zone verte) afin que cet organisme puisse jouer son rôle de façon efficace.
Comme l’a dit Charles-Félix Ross, directeur général de l’UPA, dans son allocution durant le congrès Québec Mines + Énergie en novembre 2023 :
Imaginez 3 000 éoliennes sur le territoire agricole du Québec, soit le nombre nécessaire pour répondre à la demande d’Hydro-Québec. Imaginez tous les ennuis et inconvénients de ces installations pour la pratique de l’agriculture. Imaginez la perte de territoire. Imaginez le réseau souterrain, l’immense toile d’araignée, pour raccorder toutes ces éoliennes au réseau d’Hydro-Québec.
Imaginez, enfin, l’appétit de promoteurs de toutes sortes qui voudront s’installer en marge de ces parcs pour accumuler et/ou bénéficier de cette énergie.
L’imaginer nous fait réaliser assez rapidement que ces projets doivent se faire à l’extérieur de la zone agricole. L’immensité de notre territoire, autre qu’agricole, nous permet aussi rapidement d’imaginer que c’est possible.4
2 https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2013448/terres-agriculture-mines-batteries-cptaq-quebec
3 https://www.hydroquebec.com/data/a-propos/pdf/plan-action-2035.pdf
4 https://www.upa.qc.ca/fileadmin/01_UPA_provincial/Fichiers_telechargement/2023-11_CFR_-
Recommandation
À la lumière de nos constats et des décisions gouvernementales citées au début de ce mémoire, nous recommandons que l’objet premier de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricole (LPTAAQ) soit réaffirmé pour que, en zone verte soit interdite toute implantation de parcs éoliens ou tout autre type d’infrastructures industrielles de développement énergétique.
Conclusion
Nous terminons notre mémoire en citant Jean Garon, ministre du MAPAQ de 1976 à 1985 et père de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricole, qui résume parfaitement notre point de vue:
« Si nous ne cessons pas de gruger notre richesse de terres agricoles, nous en paierons le prix.
Car quand elles sont perdues, c’est vraiment fini.5 »