« Qui ne dit mot consent! » Mmm, non!! …Oser en parler, la chronique du CALACS La Passerelle

« Qui ne dit mot consent! » Mmm, non!! …Oser en parler, la chronique du CALACS La Passerelle
Oser en parler, la chronique du CALACS La Passerelle

DRUMMONDVILLE

J’étais à la garderie pour déposer mon fils lorsqu’une des éducatrices a demandé à un enfant s’il voulait bien la suivre jusqu’à son local. L’enfant ne lui a pas répondu. Évidemment, c’était un enfant de deux ans en train de s’amuser avec une poupée… Pas surprenant qu’il ne réponde pas!…
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Elle a levé les yeux, amusée, et m’a dit : « Qui ne dit mot consent! » Elle a ensuite encouragé l’enfant à la suivre, ce qu’il a fait après avoir remis son jouet à sa place. Il n’y a rien qui cloche dans cette situation, les éducatrices de la garderie de mon fils sont toutes des femmes extraordinaires à qui je fais amplement confiance. Pourtant, quelque chose à l’intérieur de moi a griché.

Cette expression si banale de notre société : « Qui ne dit mot consent » est un adage qui signifie que le silence d’une personne qui se retrouve face à un choix ou une décision peut être interprété comme un accord implicite… Autrement dit, un OUI. Ça devrait pourtant être tout le contraire! Cette expression souligne très bien la culture du viol dans laquelle on vit parce que, si l’on vivait dans une culture du consentement, l’interprétation serait définitivement l’inverse : tant que je ne suis pas certain.e d’avoir ton consentement, je suppose que la réponse est NON! Je répète ici : l’éducatrice a bien effectué son travail, c’est l’expression banalisée qui est problématique.

La culture du viol! En gros, c’est un climat social qui rend « confortables » les auteurs de violences sexuelles, notamment celles faites aux femmes. Ce climat est causé et alimenté par la banalisation, la normalisation et la tolérance face aux agressions sexuelles. Par exemple : les blagues sur les agressions sexuelles, la responsabilisation des victimes (elle avait juste à dire non!), la normalisation (un homme a des besoins!), la banalisation (on ne peut quand-même pas détruire sa carrière pour ça!), les justifications (elle a couru après, elle était habillée trop sexy), les phrases telles que : « reviens-en, ce n’était quand-même pas un viol, c’étaient juste des attouchements! », etc. etc. etc.   

Le silence. Pour en revenir à la fameuse expression « Qui ne dit rien consent. » En tant qu’intervenante auprès des victimes d’agression sexuelle, je sais que la plupart des victimes figent, ce qui peut expliquer leur silence. Sont-elles consentantes parce qu’elles ne disent rien? Absolument pas, elles sont en mode « survie » et leur cerveau reptilien décide que de ne rien faire est la meilleure action à prendre pour s’en sortir avec le moins de conséquences possibles! Il existe aussi beaucoup d’autres raisons qui justifient un silence : la personne prend le temps de réfléchir pour arriver à une décision éclairée, ou bien elle ne sait pas comment exprimer son point de vue, ou encore elle craint la réaction de l’autre si elle refuse… Ça, et mille autres explications qui sont toutes légitimes. Un silence devrait donc toujours être interprété comme un non, ou du moins comme une hésitation, mais JAMAIS comme un oui! Pourtant, l’expression familière « Qui ne dit mot consent » exprime exactement le contraire.

Ariel et son prince. Puis le temps a filé, et quelques semaines plus tard, je visionnais la nouvelle version de « La petite sirène » (avec mon fils, je précise!) qui est sortie récemment. Je l’écoutais dans sa langue originale, en anglais, et quelque chose a encore une fois grincé… C’était lors du passage où l’on souhaite tellement que le prince Éric embrasse Ariel pour la sauver de la méchante Ursula! Voici mon humble traduction de la chanson :

« Ça ne prend pas un mot, pas un seul mot, allez vas-y, embrasse-la! »

En tant qu’intervenante qui fait de la sensibilisation et de la prévention en agression sexuelle et qui parle de consentement… Non. Ne fais pas ça! Demande-le-lui! Dis-lui que tu as vraiment envie de l’embrasser et vérifie sa réaction avant de décider de passer à l’acte ou non. Parce que, oui, ça prend un consentement pour embrasser quelqu’un. Bien sûr, le langage non verbal est une énorme partie de la communication, alors on peut déceler chez l’autre si elle est enthousiaste ou non sans nécessairement entendre un « oui » verbal. Si la personne se rétracte alors qu’on s’approche d’elle, par exemple, ou bien si elle reste en place, sourit et te regarde avec des étoiles dans les yeux… Dans tous les cas, il faut s’assurer d’avoir un consentement enthousiaste avant de l’embrasser! Nous ne pouvons pas « sauter sur la personne pour l’embrasser » sans être certains que celle-ci le veuille!

Le pouvoir des mots. Bref, tout ça pour en venir au fait que, lorsqu’on s’arrête pour le réaliser, on peut facilement retrouver la culture du viol un peu partout dans notre société. Même dans des moments qui paraissent banals. Je crois profondément que les mots font toute une différence et que le changement doit passer, en partie, par l’évolution de nos habitudes de langage. La preuve que les mots ont le pouvoir de définir qui nous sommes dès notre plus jeune âge : un enfant qui sera dévalorisé toute sa jeunesse ne développera pas la même assurance que si l’on avait fait l’inverse!

Il reste du travail à faire et porter plus attention à nos mots est une solution simple pour continuer à changer notre société pour le meilleur. Alors, si vous êtes d’accord avec moi, je choisis à ce jour que « Qui ne dit mot consent » deviendra « Qui ne dit mot ne sait probablement pas quoi dire ou faire et il est fort possible que sa réponse soit : NON alors il faut poser plus de questions pour s’assurer de bien comprendre le message derrière le silence de l’autre. » Bon, je suis d’accord, c’est un peu long. Allons-y pour « Qui ne dit mot, dit non! »

 

Paule Blanchette

Intervenante sociale, CALACS La passerelle.

 

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Paule Blanchette
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