L’Affaire Julien Lacroix et les mythes tenaces : Le narratif derrière la décrédibilisation des survivants et survivantes d’agression à caractère sexuel

L’Affaire Julien Lacroix et les mythes tenaces : Le narratif derrière la décrédibilisation des survivants et survivantes d’agression à caractère sexuel
Le Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte aux agressions à caractère sexuel dont le CALACS Drummondville dénoncent les contrecoups de l’article, “L’Affaire Julien Lacroix deux ans plus tard'' © Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.

DRUMMONDVILLE

Le Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte aux agressions à caractère sexuel dont le CALACS Drummondville dénoncent les contrecoups de l’article, “L’Affaire Julien Lacroix deux ans plus tard : Des cicatrices et des regrets”, sur la perpétuation des mythes et préjugés relatifs aux violences sexuelles.

Paru le 17 novembre 2022 dans le quotidien LaPresse, l’article signé Isabelle Hachey rapporte que des femmes ayant initialement dénoncé l’humoriste Julien Lacroix pour des agressions sexuelles et des inconduites sexuelles se rétractaient pour différents motifs, dont celui de ne pas se sentir comme une “victime”. À travers un ton sensationnaliste et des tournures de phrases subjectives, cette enquête journalistique laisse entendre qu’il serait un dommage collatéral du “tribunal de Facebook” et elle viserait à poser un “regard critique” sur le mouvement #Metoo.

Comme regroupement national qui lutte, depuis plus de quarante ans, contre les agressions à caractère sexuel par le biais de la prévention, de la défense des droits et de l’aide aux victimes et survivantes, nous croyons que cet article vient poser l’enjeu du narratif derrière la décrédibilisation des survivants et survivantes.

Julien Lacroix y est dépeint comme un homme aux prises avec des problèmes de consommation depuis l’adolescence qui “se réveille encore en panique, en pleine nuit (…)” souffrant d’un “choc de stress post-traumatique » et vivant en “ermite au cœur de Montréal” à la suite du reportage par LeDevoir en 2020 où il faisait l’objet d’allégations d’agressions sexuelles, d’inconduites sexuelles et de violences conjugales. Il passe ainsi du rôle d’agresseur qui affirme prendre conscience de ses actions à celui de victime d’un mouvement international de ras-le-bol de l’omerta et l’impunité des violences sexuelles, #Metoo.

“Je prends responsabilité sur mes actions et que je travaille chaque jour à réparer ce que j’ai brisé chez les autres et en moi (…) Je tiens aussi à souligner que j’appuie le mouvement de dénonciations1” – Julien Lacroix, Publication Facebook, Janvier 2021

Un des mythes les plus tenaces en ce qui concerne les agressions à caractère sexuel est celui selon lequel les agresseurs seraient des‘ monstres psychopathes sortis tout droit des ténèbres’. Or, les deux tiers des infractions sexuelles sont commis dans une résidence privée et la majorité des victimes connaissent leur agresseur. Les victimes entretiennent donc souvent des relations émotionnelles complexes avec leur agresseur, ce qui peut avoir un impact sur la décision de dévoiler l’agression subie.

Contacté par le Vingt55, Julie Ouellet, directrice du CALACS La Passerelle, Drummondville, n’a pas hésité à rappeler que les mythes et préjugés relatifs aux agressions sexuelles ont la vie dure! Cet article de La Presse démontre bien l’importance de poursuivre la discussion et surtout, l’éducation sur les conséquences des agressions sexuelles sur la vie des femmes de précise la directrice du CALACS La Passerelle

Sans citer des sources expertes en agression à caractère sexuel, le reportage fait également fi de certains éléments clés qui entourent les violences sexuelles et leurs dévoilements. En effet, les risques de dénoncer publiquement sont bien réels pour les victimes qui peuvent vivre énormément de violence et de re-victimisation à la suite de leur prise de parole. La peur de ne pas être cru représente aussi un obstacle majeur aux dénonciations : 60% des victimes d’agression sexuelle reçues dans les centres d’aide au Québec rapportent qu’elles n’ont pas été crues lors de leur premier dévoilement.

Il est également important de souligner que plusieurs personnes ayant subi une agression à caractère sexuel ne se considéreront pas comme ‘victime’ et ne seront pas à l’aise de nommer leur expérience comme étant une agression. Sur les plans légaux et moraux, cela ne vient pas nier qu’il puisse s’agir d’une agression.

Les violences sexuelles sont une problématique sociale bien réelle qui n’est plus à prouver.

1 femme sur 3 subira une agression à caractère sexuel au cours de sa vie.

Moins de 10% des plaintes pour agression sexuelle aboutissent à une condamnation.

Plus 96 % des agresseurs sont des hommes et 78% des victimes sont des femmes

96.8% des agresseurs sont connus des victimes

Le #Metoo a été partagé 53 millions de fois dans le monde.

Besoin d’aide? Le CALACS La Passerelle est là pour toi. https://calacs-lapasserelle.org/

Éric Beaupré
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