Itinérance à Drummondville : « Loger l’humain », une situation urgente qui dépasse les ressources disponibles à Drummondville

Itinérance à Drummondville : « Loger l’humain », une situation urgente qui dépasse les ressources disponibles à Drummondville
Un homme en situation d'itinérance à Drummondville © Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.

DRUMMONDVILLE

L’itinérance prend de l’ampleur à Drummondville et au Centre-du-Québec. L’itinérance se vit maintenant à ciel ouvert, à Drummondville, et les nouveaux visages, hommes et femmes, inquiètent autant les intervenants, les services de première ligne et les autorités, qui constatent une croissance de la problématique dans leurs interventions, à Drummondville.

Itinérance – les nouveaux visages, hommes et femmes, inquiètent autant les intervenants, les services de première ligne et les autorités © Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.

Le Vingt55 a constaté, depuis la mise à jour de la problématique grandissante de l’itinérance sur le territoire, que la réalité dépasse largement les capacités et ressources du milieu, du moins dans la MRC de Drummond.

« Pas dans ma cour », « cachez cette problématique et l’itinérance », des situations dénoncées autant par des citoyens, les intervenants en manque de ressources et de moyens ainsi que les autorités policières.

Chaque jour, les policiers sont appelés à gérer la crise qui perdure et s’intensifie à Drummondville. « Nous sommes à court de ressources et de possibilités », ont commenté les policiers rencontrés par le Vingt55. « Nos moyens sont limités, et visiblement ceux des organismes et des intervenants aussi. »

« Le visage de l’itinérance a changé depuis le début de la pandémie. Nous faisons maintenant face à plus d’itinérance visible, alors qu’avant, le visage de l’itinérance était davantage caché », confirme Philippe Lehoux, agent d’information du CIUSSS/MCQ, questionné par le Vingt55 sur la situation de l’itinérance à Drummondville.

Des camps à ciel ouvert, où des itinérants se retrouvent laissés à eux-mêmes, dans des endroits peu sécuritaires et insalubres. On compte également peu de ressources et de moyens pour répondre à la demande grandissante à Drummondville.

Depuis maintenant deux ans, l’organisme en hébergement d’urgence en itinérance l’Ensoleilvent a augmenté sa capacité d’accueil via une unité de débordement, ajoutant ainsi dix lits, maintenus à ce jour. En effet, comme le précisait le Vingt55 dans un reportage récent, ce sont « cent trente-quatre personnes différentes qui ont fait une demande d’hébergement à l’Ensoleilvent entre le 1er avril et le 1er août 2022, comparativement à quatre-vingt-dix demandes à pareille date, l’an dernier », confirme Philippe Lehoux du CIUSSS/MCQ.

« Nous travaillons activement avec les partenaires de Drummondville, dont la Corporation de développement communautaire. Les partenaires communautaires, comme l’Ensoleilvent et La Piaule, la Sûreté du Québec, la municipalité ainsi que plusieurs autres membres intersectoriels se réunissent de trois à quatre fois par année, selon les besoins et les enjeux observés. De plus, concernant la situation actuelle, une rencontre a eu lieu avec quelques partenaires à la fin du mois de juin et une autre est prévue à l’automne afin d’évaluer les différentes solutions qui peuvent être envisagées dès maintenant, ainsi qu’à moyen et long termes », de préciser M. Lehoux.

À Drummondville, une équipe d’intervenants de proximité en itinérance assure les services de santé et d’accompagnement auprès des personnes en situation d’itinérance ou à risque de le devenir. « Ce modèle est unique puisqu’il regroupe des intervenants de différents secteurs. Il jumelle des intervenants en provenance du milieu communautaire et du réseau de la santé et des services sociaux. Ce modèle a su faire ses preuves dans la région », selon l’agent d’information du CIUSSS/MCQ.

Le 11 octobre prochain se tiendra le dénombrement des personnes en situation d’itinérance au Québec. Des données seront alors recueillies pour quantifier le portrait actuel de la situation, notamment à Drummondville. Le dernier dénombrement a été effectué en avril 2018. On avait alors recensé soixante-quinze personnes en situation d’itinérance ou à risque de le devenir à Drummondville. La grande majorité de ces personnes bénéficiaient de services des organismes du territoire, comme nous l’a précisé Philippe Lehoux.

Du côté de la ville de Drummondville, la mairesse, Mme Stéphanie Lacoste, reconnaît la problématique et souhaite une implication du gouvernement.

« L’installation d’abris ou de minimaisons, dans le stationnement à l’intersection des rues Saint-Jean et Brock, avait été faite dans le cadre d’un projet-pilote », précise la mairesse en entrevue au Vingt55. Malgré les recommandations de François Gosselin de poursuivre l’initiative, considérant que la situation de l’itinérance s’intensifie et que la mesure, bien que temporaire, s’avérait utile pour la ressource, comme le démontrait le Vingt55, la ville ne reconduira pas le service, qui était géré par l’organisme. « Nous souhaitons des solutions durables », précise en revanche la mairesse, qui reconnaît l’importance de trouver des solutions rapidement. « Nous mettrons nos efforts sur la mise en place de solutions durables pour contrer l’itinérance à Drummondville », précise Mme Lacoste.

Le projet Ilot de solidarité offrira, confirme la mairesse, dès cet automne, vingt-trois logements pour différents types de clientèles, dont celle de l’itinérance, selon la mairesse.

« L’action devra venir autant du CIUSSS /MCQ que du gouvernement et nos élus dans le comté de Johnson et Drummond–Bois-Franc », d’ajouter la mairesse. « Il appartient au gouvernement provincial d’investir davantage dans le développement social, nous ne pouvons, à Drummondville comme ailleurs, soutenir davantage en ressources ou financement au niveau municipal. »

Les ressources policières utilisées pour expulser et gérer les situations de crise ont véritablement peu de moyens de rediriger adéquatement la clientèle.

« Nos interventions sont sommaires, sauf en situation de crise, où nous dirigeons les personnes vers le centre hospitalier ou à des ressources et intervenants. Il n’est pas rare, voire fréquent que nous, ou d’autres policiers se retrouvent devant la même personne quelques heures, parfois quelques minutes après l’avoir prise en charge une première fois », explilque un policier. « Une roue qui tourne et qui demande beaucoup d’effectifs et de temps », admettent les policiers, eux-mêmes à court d’effectifs sur le territoire de Drummond, comme l’a constaté le Vingt55 sur le terrain. « Nous procédons à l’expulsion de ces gens à la demande des propriétaires, commerçants ou citoyens inquiets de leur situation ou qui ne souhaitent pas les voir près de leur milieu de vie, confirme un policier. Nous prenons parfois des ententes quand c’est possible afin de donner un peu de répit à ces citoyens et gens dans le besoin et en situation d’itinérance, mais nous sommes conscients que nous ne faisons que déplacer le problème », conclut le policier.

De ces sans-abris rencontrés par le Vingt55, quelques-uns admettent être de passage. « C’est un mode de vie que nous avons choisi, nous sommes des nomades, par choix », ont admis certains d’entre eux rencontrés par le Vingt55. À Drummondville, selon les autorités, moins d’une dizaine d’itinérants semblent se trouver dans cette situation. Le nombre varie selon leurs déplacements, comme il est possible de le constater. La majorité, c’est-à-dire près d’une centaine de personnes, vivent dans des conditions précaires d’itinérance, soit aux prises avec des problématiques liées à la santé mentale ou de consommation, soit avec des problématiques organisationnelles ou à trouver un loyer abordable.

« Au-delà du logement social ou du HLM, le logement abordable demeure la solution », affirme le coordonnateur de la clinique l’Ensoleilvent, M. Gosselin, en entrevue au Vingt55.

« Déjà, les solutions mises de l’avant ne suffisent et ne suffiront pas à combler les besoins actuels et le taux croissant de personnes en situation d’itinérance temporaire ou permanente », d’affirmer le coordonnateur. De plus en plus de filles et de femmes sont au nombre des nouveaux visages de l’itinérance, ce que confirme aussi M. Gosselin « Elles n’arrivent plus à y arriver, les raisons sont multiples, mais le prix des logements est un facteur important pour elles, pour bon nombre d’entre eux, hommes ou femmes, devant le prix des loyers, c’est manger ou avoir un toit », de confirmer le coordonnateur de la clinique l’Ensoleilvent.

Du côté des députés de Johnson et de Drummond–Bois-Francs, contactés par le Vingt55 et interpellés par la situation,  les députés André Lamontagne et Sébastien Schneeberger précisent que  « La situation de l’itinérance est très préoccupante, car elle concerne la vie d’hommes et de femmes qui font face à de grandes difficultés. Notre gouvernement, avec Lionel Carmant, a agi en mettant en place, entre autres, le plan d’action interministériel en itinérance, qui mise sur la prévention et l’accompagnement des personnes en situation d’itinérance ou en voie de le devenir. Il s’agit d’un investissement de 280 M $ sur 5 ans.

Le gouvernement et le CIUSSS travaillent étroitement avec les organismes communautaires pour adresser cette problématique complexe et multi-facette; ils sont nos principaux partenaires et ils font un travail extraordinaire de C’est le cas ici, à Drummondville, avec notamment L’Ensoleivent ou La Piaule. ont mentionné André Lamontagne et Sébastien Schneeberger, respectivement candidats pour la Coalition Avenir Québec dans Johnson et Drummond-Bois-Francs.

Itinérance à Drummondville, les nouveaux visages, hommes et femmes, inquiètent autant les intervenants, les services de première ligne et les autorités © Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.

En mettant l’accent sur la dimension éminemment humaine que représente l’accès à un logement digne et sécuritaire pour la population drummondvilloise et québécoise, les acteurs du logement social et communautaire annoncent la tenue d’un débat national sur l’habitation.

« Parce que l’avenir nous habite », un titre évocateur choisi par le RQOH pour définir leur colloque. Il rappelle le ton que les acteurs du logement social et communautaire souhaitent donner au débat électoral qu’ils co-organisent. « Au travers de ce débat, nous encourageons les candidats à se prononcer en faveur d’un investissement massif dans le logement hors marché. Construire du logement communautaire et social, c’est contribuer à l’élaboration d’un solide filet social. On parle de lieux de vie, de famille, de communautés. Se loger est un droit essentiel qui constitue l’ancrage d’un être humain dans la société. Il devrait être à la base de tout programme politique », a rappelé André Castonguay, directeur général par intérim du RQOH.

Celui-ci permettra aux représentants des cinq principaux partis politiques en lice de s’exprimer sur cet enjeu central de campagne. Il se déroulera le mardi 13 septembre prochain, de 14 h 15 à 16 h 15, à l’hôtel Bonaventure de Montréal, et se tiendra dans le cadre du colloque bisannuel du RQOH.

Les représentantes et représentants des cinq principaux partis seront invités à répondre à une série de questions et à faire part de leurs engagements sur une variété d’enjeux touchant à l’habitation sociale et communautaire, ainsi qu’au droit du logement.

Ont confirmé leur participation :

Karine Boivin-Roy, candidate de la Coalition Avenir Québec dans la circonscription d’Anjou-Louis-Riel

Marie-Claude Nichols, candidate du Parti libéral du Québec dans la circonscription de Vaudreuil

Andrés Fontecilla, candidat de Québec solidaire dans la circonscription de Laurier-Dorion

Raphaël Déry, candidat du Parti Québécois dans la circonscription de Gatineau

Carmel-Antoine Bessard, candidate du Parti conservateur du Québec dans la circonscription de Bourassa-Sauvé.

Le débat est co-organisé par l’Association des groupes de ressources techniques du Québec (AGRTQ), la Confédération québécoise des coopératives d’habitation (CQCH), la Fédération des locataires d’habitations à loyer modique du Québec (FLHLMQ), le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), le Regroupement des offices d’habitation du Québec (ROHQ) et le Réseau québécois des OSBL d’habitation (RQOH). Il sera animé par Sophie Villeneuve, vice-présidente de la firme d’affaires publiques Catapulte.

Cette activité, retransmise en direct sur la page Facebook de l’événement, se tiendra dans le cadre du huitième colloque bisannuel du Réseau québécois des OSBL d’habitation, toutefois, l’accès au débat est indépendant et ouvert au public, qui est invité à se présenter sur place à compter de 14 h. L’activité est également ouverte aux représentants des médias et sera suivie d’un point de presse avec les représentantes et les représentants des six regroupements.

Itinérance à Drummondville, les nouveaux visages, hommes et femmes, inquiètent autant les intervenants, les services de première ligne et les autorités © Crédit photo Eric Beaupré / Vingt55. Tous droits réservés.

Éric Beaupré
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